Page:Ségur - Les vacances.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
245
LES VACANCES.

beaucoup vanté un petit meuble que venait de terminer Léon, celui-ci, touché de la générosité de Paul, alla à lui et lui tendit la main sans parler. Paul la serra fortement, et lui dit avec ce sourire bon et affectueux qui lui attirait toutes les sympathies : « Merci, Léon, merci. » Cette simple parole, dite si simplement, acheva de fondre le cœur de Léon, qui se jeta dans les bras de Paul en disant : « Paul, sois mon ami comme tu es celui de mes frères, cousins et amis. Je rougis de ma conduite envers toi, envers le pauvre petit Jacques. Oui, je suis honteux de moi-même ; j’ai été jaloux de toi, je t’ai détesté, je me suis conduit comme un mauvais cœur ; j’ai détesté ton excellent père. Toi qui lui dis tout, dis-lui combien je suis repentant et honteux ; dis-lui que je t’aimerai autant que je te détestais, que je tâcherai de t’imiter autant que j’ai cherché à te dénigrer, dis-lui que je le respecterai, que je l’aimerai tant, qu’il me rendra son estime. N’est-ce pas, Paul, tu le lui diras, et toi-même tu me pardonneras, tu m’aimeras un peu ?

PAUL.

Non, pas un peu, mais beaucoup. Je savais bien que cela ne durerait pas. Je comprends si bien ce que tu as dû éprouver en voyant un étranger prendre pour ainsi dire de force l’amitié et