Page:Ségur - Mémoires d’un âne.djvu/257

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Henri.

Bah ! tous les ânes se ressemblent et ont beau faire, ils ne sont jamais que des ânes.

Camille.

Il y a âne et âne.

Henri.

Ce qui n’empêche pas que, pour dire qu’un homme est bête, ignorant et entêté, on dit : « Bête comme un âne, ignorant comme un âne, têtu comme un âne », et que si tu me disais : « Henri, tu es un âne », je me fâcherais, parce qu’il est bien certain que je prendrais cela pour une injure.

Camille.

Tu as raison, et pourtant je sens et je vois, d’abord que Cadichon comprend beaucoup de choses, qu’il nous aime, et qu’il a un esprit extraordinaire, et puis que les ânes ne sont ânes que parce qu’on les traite comme des ânes, c’est-à-dire avec dureté et même avec cruauté, et qu’ils ne peuvent pas aimer leurs maîtres ni les bien servir.

Henri.

Alors, d’après toi, c’est par habileté que Cadichon a fait découvrir les voleurs, et qu’il a fait tant de choses qui semblent extraordinaires ?

Camille.

Certainement, c’est par son esprit, et c’est parce qu’il le voulait, que Cadichon a fait prendre les voleurs. Pourquoi l’aurait-il fait, selon toi ?