Page:Ségur - Mémoires d’un âne.djvu/36

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Antoine.

Ah ! ah ! ah ! Est-il bête avec ses ânes dans un sac ! Comme si on ne pouvait pas les numéroter, 1, 2, 3, 4, 5, 6, mettre les numéros dans un sac, et tirer au hasard chacun le sien.

— C’est vrai, c’est vrai, s’écrièrent les cinq autres. Ernest, fais les numéros pendant que nous allons les écrire sur le dos des ânes.

Ces enfants sont bêtes, me disais-je. S’ils avaient l’esprit d’un âne, au lieu de se donner l’ennui d’écrire les numéros sur notre dos, ils nous rangeraient tout simplement le long du mur : le premier serait 1, le second 2, et ainsi de suite.

Pendant ce temps, Antoine avait apporté un gros morceau de charbon. J’étais le premier, il m’écrivit un énorme 1 sur la croupe ; pendant qu’il écrivait 2 sur la croupe de mon camarade, je me secoue fortement pour lui faire voir que son invention n’était pas fameuse. Voilà le charbon parti et le 1 disparu.

« Imbécile ! s’écria-t-il ; il faut que je recommence. »

Pendant qu’il refait son no 1, mon camarade, qui m’avait vu faire, et qui était malin, se secoue à son tour. Voilà le 2 parti. Antoine commence à se fâcher ; les autres rient et se moquent de lui. Je fais signe aux camarades, nous le laissons faire ; aucun ne bouge. Ernest revient avec les numéros dans son mouchoir : chacun tire. Pendant qu’ils regardent leurs numéros, je fais encore un signe