de ma queue. Le désir de la vengeance me donna des ailes. Je courus avec une telle vitesse, que j’arrivai au but non seulement le premier, mais laissant au loin derrière moi tous mes rivaux. J’étais haletant, épuisé, mais heureux et triomphant. J’écoutais avec bonheur les applaudissements des milliers de spectateurs qui bordaient la prairie. Je pris un air vainqueur et je revins fièrement au pas jusqu’à la tribune du maire, qui devait donner le prix. La bonne femme Tranchet s’avança vers moi, me caressa et me promit une bonne mesure d’avoine. Elle tendait la main pour recevoir la montre et le sac d’argent que le maire allait lui remettre, lorsque André et Jeannot accoururent en criant :
« Arrêtez, monsieur le maire, arrêtez ; ce n’est pas juste, ça. Personne ne connaît cet âne ; il n’appartient pas plus à la mère Tranchet qu’au premier venu ; cet âne ne compte pas, c’est le mien qui est arrivé le premier avec celui de Jeannot ; la montre et le sac doivent être pour nous.
— Est-ce que la mère Tranchet n’a pas mis sa pièce au sac de course ?
— Si fait, monsieur le maire, mais…
— Quelqu’un s’y est-il opposé quand elle y a mis ?
— Non, monsieur le maire, mais…
— Est-ce qu’au moment du départ vous vous y êtes opposés ?
— Non, monsieur le maire, mais…