Page:Ségur - Nouveaux contes de fées.djvu/179

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demain, elle se dirigea machinalement vers la rotonde ; elle y entra pensive et souriante, et se trouva en face de la toile qui recouvrait le trésor.

« C’est demain, dit-elle, que je dois enfin savoir ce que referme cette toile… Si je voulais, je pourrais bien le savoir dès aujourd’hui, car j’aperçois quelques petites ouvertures dans lesquelles j’introduirais facilement les doigts… et en tirant un peu dessus… Au fait, qui est-ce qui le saurait ? Je rapprocherais la toile après y avoir un peu regardé… Puisque ce doit être à moi demain, je puis bien y jeter un coup d’œil aujourd’hui. »

Elle regarda autour d’elle, ne vit personne, et, oubliant entièrement, dans son désir extrême de satisfaire sa curiosité, la bonté du prince et les dangers qui les menaçaient si elle cédait à la tentation, elle passa ses doigts dans une des ouvertures, tira légèrement : la toile se déchira du haut en bas avec un bruit semblable au tonnerre, et offrit aux yeux étonnés de Rosalie un arbre dont la tige était en corail et les feuilles en émeraudes ; les fruits qui couvraient l’arbre étaient des pierres précieuses de toutes couleurs, diamants, perles, rubis, saphirs, opales, topazes, etc., aussi gros que les fruits qu’ils représentaient, et d’un tel éclat que Rosalie en fut éblouie. Mais à peine avait-elle envisagé cet arbre sans pareil, qu’un bruit plus fort que le premier la tira de son extase : elle se sentit enlever et transporter dans une plaine, d’où elle aperçut le palais du prince s’écroulant ; des cris effroyables sortaient des ruines du palais, et bien-