Page:Ségur - Quel amour d’enfant.djvu/32

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léontine.

Mais c’est incroyable ! Je n’en reviens pas.

giselle.

Alors mon oncle m’a prise ; il m’a traînée, malgré mes cris, dans toute la maison, en me tirant par les poignets, qui sont tout rouges encore ; il m’a entraînée dans un cabinet ; il m’a attachée avec des cordes en cuir qui me faisaient un mal affreux, et il m’a laissée là ; j’ai eu beau le supplier, lui demander grâce, il m’a laissée là pendant plus d’une heure. Quand il m’a détachée, j’étais presque évanouie, tant j’avais eu mal. Vous voyez bien, maman, pourquoi je ne veux plus retourner chez mon oncle. Je l’aime beaucoup pourtant, mais il est trop méchant. »

Léontine pleurait à chaudes larmes ; les souffrances qu’avait endurées sa malheureuse enfant, la cruauté de son frère et de sa sœur Laurence la mettaient hors d’elle. Elle prit dans ses bras la douce, l’innocente Giselle et la couvrit de baisers.

« Chère petite victime d’une incroyable jalousie, dit-elle, tu n’iras plus chez ton oncle qu’avec moi, et je ne te quitterai pas d’un instant. Pauvre, pauvre enfant ! »

Les larmes de Léontine redoublèrent. Giselle triomphante courut chez sa bonne pour lui recommander de dire comme elle.