de l’après-midi, on arriva à Bargemont. Mais, le postillon s’étant égaré dans les montagnes, on y arriva par une route presque impraticable, et il fallut traverser tout le village et passer devant le château, qu’on aurait pu et dû éviter en suivant la route ordinaire : ainsi le cercueil de l’héroïque jeune homme passa devant ce château où il avait vécu de si douces et de si heureuses années, où s’était écoulée dans la joie et la paix du cœur sa pure et riante jeunesse.
On arriva enfin à une petite chapelle située au pied de la montagne où se trouvent le village et le château de Bargemont, chapelle qui appartient à la famille de Villeneuve et où le corps du défunt devait reposer jusqu’au lendemain. Le curé et le vicaire se tenaient à l’entrée pour recevoir le cercueil avec les bénédictions de l’Église. Quand on l’eut déposé dans cet asile provisoire, tout le monde se retira, et la pauvre mère resta seule près du corps de son fils ; elle y passa toute la fin du jour et une partie de la nuit. Vers minuit, elle consentit à prendre un peu de repos ; mais, après deux heures inutilement employées à chercher du sommeil, elle se releva, poussée par un instinct plus fort que la raison, et retourna près de son cher cercueil, où elle resta à prier jusqu’au jour. Durant toute cette nuit de prière et de solitude, ou plutôt de tête-à-tête avec le cercueil de son fils, elle goûta le calme et la même abondance de consolations spirituelles qu’elle avait éprouvés sur le port de Marseille.
À six heures du matin, le vicaire de Bargemont vint dire une première messe à la chapelle, et, à sept heures et demie, tout se prépara pour les funérailles : elles devaient avoir lieu dans la chapelle de Notre-Dame, située près de là, au sommet d’une petite montagne qui renferme le caveau de famille des Villeneuve. Tout le clergé des environs ayant en tête le curé de la paroisse, les con-