Lazzari enfin arrivée. Nous allâmes droit à sa chaumière, et, sans nous faire autrement annoncer, nous frappâmes à la porte. Une jeune fille pauvrement vêtue vint nous ouvrir : c’était la sœur de la patiente. Sa physionomie portait un cachet d’inconsolable tristesse : hélas ! comment le sourire aurait-il pu pénétrer dans ce séjour de la souffrance incarnée ! Nous lui dîmes l’objet de notre visite elle ne nous répondit rien, mais, prenant un air de résignation assez maussade comme pour nous dire : « Ne pouviez-vous pas laisser ma pauvre sœur souffrir tranquillement ? » elle nous fit traverser une petite pièce noire et enfumée qui sert à la fois de cuisine, de salle à manger et de salle de réception, et nous introduisit dans une seconde chambre plus misérable que la première. C’est là que s’offrit à nos regards le spectacle le plus pitoyable que des yeux humains aient jamais contemplé.
Au milieu de la chambre, sur un pauvre grabat, l’addolorata était étendue, immobile, sanglante, couronnée de ses plaies comme de l’auréole des martyrs : pour tout dire en un mot, elle nous apparut comme un crucifix vivant. Son front était percé de trous nets et profonds, traces visibles de cette invisible couronne d’épines que son Jésus bien-aimé avait daigné partager avec elle. Ses joues creuses étaient couvertes d’une épaisse couche de sang desséché : c’était celui qui avait coulé sur son front le vendredi précédent et qu’on n’avait pu lui enlever à cause des souffrances intolérables que lui cause tout contact. Ses cheveux épars étaient également collés par le sang. Un anneau de cuivre, suspendu à une corde qui partait du plafond, soutenait les pouces de ses deux mains étroitement enlacées l’une à l’autre, et qu’elle ne peut, sans cruellement souffrir, ni détacher ni laisser reposer sur sa poitrine. Ces pauvres mains maigres et décharnées, mais bénies de Dieu, étaient percées de plaies larges, arron-