Page:Ségur - Témoignages et souvenirs.djvu/270

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tants de cette demeure sont des chrétiens, et dans des cartes de géographie, cartes de l’Inde, de l’Asie et de l’Océanie, qui semblent indiquer qu’ils sont aussi de hardis voyageurs.

De chaque côté des corridors, des portes, placées symétriquement à la suite l’une de l’autre, s’ouvrent de petites chambres, semblables à des cellules, dont les murailles sont pauvres et nues, et dont un vieux bureau chargé de vieux livres, une mappemonde, un lit et quelques chaises de paille composent tout l’ameublement. L’austérité de ce séjour n’est tempérée que par la vue d’un vaste et beau jardin, où l’œil se repose sur de frais gazons et va se perdre sous de longues allées bordées d’arbres, pleines d’ombres et de fraîcheur. Tout, dans cette maison, respire le silence, la paix et le recueillement. Les bruits de la rue expirent à ses portes ; c’est vraiment une solitude au cœur de Paris ; et cette solitude est le séminaire des Missions étrangères.

C’est là que quatre-vingts ou cent jeunes prêtres, sans cesse renouvelés, déjà séparés du monde qui ne les connaît pas, se préparent, dans la prière et la retraite, à aller prêcher l’Évangile aux peuples infidèles de l’Inde, de la Chine et du Japon. C’est là qu’ils se livrent avec ardeur à l’étude des langues asiatiques, non pas pour aller porter leur science dans une chaire du collége de France ou sur les bancs enviés d’une académie, mais pour évangéliser des idolâtres, et pouvoir un jour rendre témoignage à Jésus-Christ dans la langue de leurs juges et de leurs bourreaux. C’est de là enfin qu’ils partent incessamment, comme jadis les apôtres au sortir de Jérusalem, pour se disperser et porter la parole de Dieu jusqu’au bout du monde, agneaux envoyés sans défense au milieu des loups, sublimes et infatigables voyageurs que dévore, non la soif de la science, mais la soif des