Page:Ségur - Un bon petit diable.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

homme noir, énorme, qui m’a barré le passage ; j’ai crié, comme Monsieur peut bien penser. Puis il a enlevé le couvercle de ma soupière, il a enfoncé dedans quelque chose de noir comme lui, et il a disparu. C’est alors que j’ai jeté mon second cri. Et il y avait de quoi, comme Monsieur peut bien penser. »

Old Nick enleva le couvercle et vit flotter réellement quelque chose de noir dans la soupière ; il piqua avec sa fourchette et retira avec grande peine un chat, un énorme chat, le chat noir du surveillant. Chacun poussa un cri d’horreur et de terreur : horreur pour la fin prématurée et cruelle de leur complice ; terreur, à cause de l’homme noir qui faisait sa seconde apparition dans la maison. Personne ne parla ; M. Old Nick fit emporter la soupe, que tous regrettaient, mais à laquelle personne n’osa goûter. Betty alla chercher le second plat, qui arriva sain et sauf et qui fut adroitement placé sur la table sans perdre une goutte de son jus. C’était un bon morceau de bœuf braisé dont Betty avait enlevé un bout, qu’elle trouva moyen de glisser à Charles dans la récréation qui suivit le dîner. Elle lui raconta qu’elle avait trouvé le chat mort dans le bûcher, probablement par suite de sa chute, et qu’elle s’en était servie pour faire croire à une seconde apparition de l’homme noir.

La récréation fut troublée par cinq ou six exécutions ordonnées par les frères Old Nick. Le sonneur se vengea sur les malheureux enfants de la