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un monde inconnu

avec soin l’amarre qui retenait l’obus au rocher et s’assurèrent qu’aucune oscillation ne pouvait la détacher : c’était leur unique et suprême ressource dans ce monde fantastique où ils se trouvaient perdus.

De retour à la caverne des diamants, ils s’engagèrent résolument dans la galerie qu’ils avaient choisie. Pendant le premier jour, le voyage s’effectua sans trop de peine. Ils suivaient évidemment la cheminée d’un ancien volcan ; les couches de roches qu’ils traversaient présentaient dans leurs stratifications successives à peu près les mêmes dispositions que celles qui forment la croûte terrestre. Ils avaient d’abord rencontré des roches primitives : gneiss et micaschiste. Puis étaient venus les terrains primaires. Ils avaient franchi les couches silurienne et dévonienne, et ils étaient au troisième jour de leur marche lorsqu’apparurent les premières traces de terrain carbonifére.

« Nous approchons évidemment de la surface, fit Jacques. Si nous étions sur la Terre, nous pourrions espérer de voir dans deux ou trois jours à peine la lumière du Soleil.

— Oui, dit Marcel, mais comment déterminer ici l’épaisseur des couches lunaires qui nous séparent encore de la surface ? Qui sait d’ailleurs ce que les éruptions volcaniques dont la Lune a été le théâtre ont pu accumuler sur le sol primitif de matériaux en fusion arrachés à la profondeur de ses entrailles ? Qui sait si nous ne nous heurterons pas contre des murs impénétrables de laves refroidies ?

— Nous avons peut-être, dit Jacques, à redouter un péril plus grand encore. Depuis quelques heures il me semble que ma respiration est plus pénible et que l’air arrive plus rare à mes poumons.

— C’est vrai, dit lord Rodilan ; j’attribuais à la fatigue cette difficulté de respirer dont je souffre aussi moi-même ; mais évidemment Jacques a raison, l’air se fait plus rare.

— C’est bien ce que j’avais craint, dit Marcel ; j’hésitais à vous faire part de mes appréhensions, espérant m’être trompé. Mais il n’y a plus à en douter, nous éprouvons ce que ressentent ceux qui tentent sur la terre de hautes ascensions et qu’on appelle le mal des montagnes… Mais où est donc allé lord Rodilan ?