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Page:Sélènes Pierre un monde inconnu 1896.djvu/120

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un monde inconnu

comme embaumé. Autour d’eux s’empressaient des êtres dont le visage sans barbe, les longs cheveux, la douceur des traits, les robes longues et flottantes, trahissaient le sexe. Leur voix était douce, et elles s’entretenaient dans une langue harmonieuse et sonore dont les accents, cadencés comme par un rythme caressaient l’oreille.

Bientôt ranimés, Marcel et ses deux compagnons sentirent se réveiller en eux les tortures de la faim. Ils désespéraient de se faire comprendre de celles qui les entouraient lorsque lord Rodilan, jetant les yeux autour de lui, reconnut, rangés dans la salle où ils se trouvaient, les divers objets qui garnissaient l’obus dans lequel ils avaient accompli leur étonnant voyage. Il désigna du doigt une boîte de forme carrée qu’on s’empressa de lui apporter et qu’il ouvrit avec effort.

Ses deux amis et lui se mirent à dévorer les biscuits qu’ils en retiraient avec une avidité gloutonne que Jacques, en sa qualité de médecin, ne tarda pas à modérer. Les femmes qui les entouraient donnaient, à ce spectacle évidemment nouveau pour elles, les marques de la plus complète stupéfaction.

« Qu’ont-elles donc à nous regarder ainsi ? grommelait lord Rodilan ; on dirait qu’elles n’ont jamais vu un honnête Anglais satisfaire son appétit. »

Et, comme le peu de nourriture qu’il avait prise lui avait rendu ses forces, il se leva et alla prendre un flacon de vieux bourgogne dont il se versa une large rasade, ainsi qu’à ses deux compagnons.

En les voyant absorber ce liquide qui leur était inconnu, les habitantes du monde lunaire passèrent de la stupéfaction au plus complet ahurissement.

« Les singulières personnes ! » murmurait Marcel.

Telle avait été l’entrée de nos trois voyageurs dans ce monde inconnu qu’ils venaient visiter de si loin.