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un monde inconnu

Quelques-unes des théories exposées avec chaleur par Marcel ou par Jacques les laissaient assez froids ; ils semblaient se dire : Il y a longtemps que nous avons franchi ces degrés de la science.

Toutefois les albums photographiques, dont l’obus renfermait une ample collection, excitèrent leur admiration.

Ils avaient pris tout d’abord ces épreuves pour des dessins d’une extrême finesse ; leur étonnement fut grand lorsqu’ils apprirent que c’était la lumière solaire seule qui, captée et fixée sur des plaques de verre enduites d’une substance sensible, avait dessiné ces images. Ils connaissaient bien les lois de l’optique, la réfraction des rayons lumineux passant à travers les lentilles et s’épanouissant sur un écran ; mais l’idée ne leur était jamais venue de chercher à saisir et à rendre durables ces images fugitives.

Marcel jouissait de leur étonnement. Il leur montra l’appareil photographique qu’il avait apporté et leur en expliqua le fonctionnement ; et, comme l’un de ceux qui l’entouraient s’écriait : « Il est bien fâcheux que nous soyons privés de la lumière du Soleil », il le rassura et lui promit d’exécuter, à l’aide de la lumière qui éclairait le monde lunaire, des épreuves semblables à celles qu’ils avaient sous les yeux.

Au nombre des objets exposés figuraient les armes dont s’étaient munis les trois explorateurs, des revolvers, des carabines à répétition du modèle le plus perfectionné. Les albums renfermaient aussi l’image de ces engins puissants de destruction créés par le génie de la guerre, preuve irréfutable de l’infériorité de notre race. Les savants qui considéraient ces instruments de mort ou qui feuilletaient les albums, avaient une connaissance approfondie de la balistique. Mais il ne pouvait venir à l’esprit de ces hommes qui avaient toujours vécu dans une atmosphère de concorde et de paix, que des créatures humaines en vinssent à ce point de folie sanguinaire de s’entr’égorger pour se disputer les misérables lambeaux de la planète qu’elles occupaient.

Ils ne virent donc là tout d’abord que des appareils scientifiques. Marcel se garda bien de les détromper ; il se réservait de faire connaître plus tard à quelques savants de choix, et dans des entretiens confidentiels, l’histoire lamentable de notre humanité,