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l’annonce du « new-york herald »

sa résolution fut immuable, comme le cours des astres qu’il observe. Lassé de mes instances, il m’interdit sa maison et m’enjoignit de ne paraître devant lui que lorsque j’aurais rempli la condition que m’imposait son égoïsme de savant.

« Trop faible pour résister à l’autorité paternelle, Hélène n’a pu que pleurer devant le refus obstiné qui brisait son cœur. Je l’ai quittée désespérée, ne sachant s’il me sera jamais permis de la revoir.

— Et tu n’as rien tenté pour essayer de satisfaire cet intraitable savant ? demanda Marcel d’un air où l’on sentait percer une légère ironie.

— Qu’aurais-je pu faire ? Voué à l’étude d’une science à laquelle je me suis consacré tout entier et jusqu’aux limites extrêmes de laquelle je me suis avancé, comment aurais-je pu recommencer, avec un autre but, une vie d’études ? Pour atteindre à ce point où l’esprit peut reculer les bornes d’une science et réaliser quelque grande conquête sur l’inconnu, il faut d’abord avoir absorbé tout ce que, dans cet ordre d’idées, l’humanité a emmagasiné de connaissances. Pour cela il me faudrait dix années d’études acharnées, sans avoir même la certitude du succés. Non, la lutte est impossible ; j’y renonce, je m’abandonne à ma malheureuse destinée.

— Homme de peu de foi, reprit Marcel en souriant, je t’ai connu plus brave et plus vaillant. Comme l’amour détrempe les âmes et amollit les courages ! Eh bien ! c’est moi qui vais t’apporter le salut.

— Toi ? s’écria Jacques.

— Oui, moi ; regarde. »

Et il déploya sous ses yeux la quatrième page d’un journal américain en date du 1er juin 188., qu’il tira de sa poche, et sur laquelle se détachait en caractères gigantesques l’annonce suivante, dont nous donnons la traduction :