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un monde inconnu

villes qu’ils traversent ; tour à tour Rouen, Nantes, Bordeaux, Lyon attiraient ses regards.

Puis, tandis que lord Rodilan, après avoir jeté un regard sur Londres, se complaisait à passer en revue sur la surface du monde tous les points où l’avide nation anglaise avait planté son drapeau, et sentait son cœur se gonfler d’un insolent orgueil, Marcel, franchissant les frontières de la France, s’arrêtait, non sans un mélancolique regret, sur les provinces violemment séparées de la mère patrie.

Mais bientôt, s’arrachant à cette contemplation qui ravivait en lui de si cruels souvenirs, il franchissait le Rhin, passait sur l’Allemagne, à ce moment toute couverte de nuages, mais qui, son imagination aidant, lui semblait toute hérissée d’armes, pour courir au bord de la Néva, où son âme patriotique semblait deviner de futurs alliés. Bientôt, redescendant au sud de l’Europe, il suivait ces côtes si pittoresquement découpées et que l’atmosphère, plus transparente dans cette région, lui permettait de distinguer avec plus de netteté.

C’était la Grèce étalée comme une feuille de mûrier, l’Italie qui s’allonge vers le continent africain, l’Espagne toute zébrée de chaînes de montagnes, l’Algérie étroitement serrée entre la Méditerranée et l’Atlas, le Sahara déroulant ses longues plaines jaunâtres jusque vers l’Afrique centrale aux mystères insondables.

Mais toujours son regard revenait vers la France, cette douce patrie qu’on peut bien quitter, mais qu’on ne saurait jamais oublier.

Cependant, à mesure que le temps marchait, le globe terrestre tournait sur son axe ; l’Europe s’effaçait peu à peu, et déjà les côtes du continent américain semblaient sortir de l’Atlantique.

« Amis, leur dit alors Rugel, pardonnez-moi de vous arracher à ce spectacle qui, je le comprends, charme vos cœurs ; mais vous êtes ici chez vous et vous aurez le temps de contempler à loisir la Terre dans toutes ses phases, car votre séjour dans notre observatoire se prolongera autant que vous le jugerez nécessaire. Laissez-moi vous montrer les appartements qui vous sont réservés ; puis je vous abandonnerai aux soins du savant Mérovar, mon col-