Page:Sélènes Pierre un monde inconnu 1896.djvu/268

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
252
un monde inconnu

Comme tous les autres habitants du monde lunaire, elle connaissait leur histoire et elle n’avait pu se défendre d’un sentiment d’admiration profonde pour ces hommes qui avaient fait si héroïquement le sacrifice de leur vie. Elle avait voulu présider elle-même aux soins qui leur étaient donnés. Elle suivait d’un regard ému les progrès rapides de cette résurrection, et lorsqu’elle constata que, malgré la santé physique revenue, leur esprit tardait à reprendre toute sa puissance et toute sa lucidité, elle se sentit profondément troublée et s’en ouvrit a Azali.

Le jeune sayant était depuis longtemps l’ami de son cœur.

Ils avaient vécu l’un à côté de l’autre, et, dans ce monde où les sentiments se développaient en toute liberté et sans qu’aucune convenance vint jamais les contraindre, ils s’étaient sentis portés l’un vers l’autre et s’étaient abandonnés au charme d’une affection partagée. Comme ils n’avaient rien à cacher et ne pouvaient du reste rien dissimuler de ce qu’ils éprouvaient, Rugel avait eu connaissance de ce penchant réciproque aussitôt qu’il avait pris naissance. Tout dans cet amour, qui ne ressemblait en rien aux passions de la Terre, était pur, simple et loyal. C’est ainsi que les choses se passaient toujours dans ce milieu privilégié, et, selon toute vraisemblance, ils devaient bientôt s’unir et fonder autour de Rugel une nouvelle famille.

L’accident qui était survenu aux habitants de la Terre avait rapproché la jeune fille de celui que tout le monde autour d’elle considérait comme son fiancé.

Retenu par les soins dont les trois malades étaient l’objet, Azali ne s’éloignait guère de la maison où ils avaient été transportés. Tout le temps qu’il ne passait pas auprès d’eux il le consacrait à celle que son cœur avait choisie.

Avec l’innocence et la liberté de mœurs où rien d’impur ne germait jamais, ils allaient souvent, lorsque Rugel était rappelé à la capitale par les devoirs de sa charge, se promener le long des rivages enchantés de l’île ou dans les bosquets fleuris dont elle était couverte.

Et leurs entretiens, tour à tour graves et enjoués, trahissaient la sérénité de leur âme, leur calme confiance dans l’avenir. Rien