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un monde inconnu

vie l’honneur de les tenir pour des amis. J’aurai dû au moins à ce voyage l’insigne bonheur d’en rencontrer deux, et cela me suffit. »

L’amitié qui unissait ces trois hommes était maintenant devenue indissoluble. Née par l’effet du hasard, de la pensée commune de tenter quelque chose d’inouï, elle s’était fortifiée au milieu des plus redoutables épreuves, des fortunes les plus diverses subies ensemble, et aujourd’hui le succès obtenu, grâce à leur indomptable énergie, la consacrait à jamais.

Du jour où ils s’étaient embarqués tous les trois dans l’obus de la Columbiad et s’étaient confiés aux hasards de l’immensité, ils ne s’étaient jamais quittés.

C’est toujours appuyés les uns sur les autres qu’ils ayaient affronté des périls inconnus, risqué cent fois leur vie, triomphé enfin de la nature elle-même, dont ils semblaient avoir vaincu les lois. Quoi qu’il arrivât désormais, ils étaient unis par des liens que rien ne pouvait briser.

Cependant les lettres magiques s’étaient succédé à intervalles réguliers, et chaque fois qu’à leur éclat flamboyant succédaient les ténèbres, ils voyaient briller au loin, immuable et fixe, le signal de Long’s Peak.

« Décidément, murmura lord Rodilan, nos amis manquent d’imagination. Leurs phrases ne sont pas longues : Un point ; c’est tout.

— Vous raillez, mon cher Rodilan, fit Marcel ; mais cela même confirme mes prévisions. Il est bien certain, à mon avis, que s’ils comptaient nous envoyer d’Amérique les signaux qui doivent permettre de correspondre utilement, ils auraient déjà trouvé le moyen d’assurer ces communications. Évidemment ils se préparent. Combien de temps leur faudra-t-il pour être en mesure ? Eux seuls peuvent le savoir. Mais je suis convaincu qu’à un moment donné, bientôt peut-être, nous verrons apparaître quelque chose de nouveau qui nous donnera pleine satisfaction. Je le répète, nous n’avons qu’à attendre. »

Et il fut convenu que, jusqu’à nouvel ordre, on s’en tiendrait aux signaux échangés jusqu’à ce moment.