Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/365

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donnez ? » Bien plus ! c’est afin de ne rien perdre. Qu’un don soit déposé en un lieu tel, qu’on ne soit pas obligé de l’y reprendre, mais que de là il puisse être rendu. Qu’un bienfait soit placé comme un trésor profondément enfoui, que l’on ne doit pas retirer de terre, à moins qu’il n’y ait nécessité. Voyez la maison de l’homme riche ? Quel vaste champ cette enceinte même n’offre-t-elle pas à la bienfaisance. Car, la libéralité, quel est celui qui l’appelle de ce nom, dans l’intérêt seul des citoyens vêtus de la toge ? C’est aux hommes, que la nature nous ordonne d’être utiles ; qu’ils soient esclaves ou libres, nés libres ou affranchis, qu’ils aient reçu la liberté selon les formes juridiques40, ou dans une réunion d’amis, qu’importe ? Partout où il y a un homme, il y a place pour un bienfait. Le riche peut donc aussi répandre l’argent dans l’intérieur de sa maison, et pratiquer la libéralité : car ce n’est point comme étant due à des hommes libres, c’est comme partant d’une âme libre, qu’elle a été ainsi nommée. Chez le sage, on ne la voit, ni se précipiter sur des gens tarés et indignes, ni jamais errer, tellement épuisée de fatigue, qu’elle ne puisse, à la rencontre d’un homme digne, couler chaque fois comme à pleins bords. Ainsi, nul motif pour que vous entendiez de travers ce que disent d’honnête, de courageux, de magnanime, ceux qui étudient la sagesse. Et d’abord, faites attention à ceci : autre est celui qui étudie la sagesse, autre celui qui déjà la possède. Le premier vous dira : « Je parle très bien ; mais je roule encore dans la fange du mal. L’équité ne permet pas que vous me contrôliez d’après mon engagement pris à la lettre, quand je m’applique le plus à me faire, à me former, à m’élever au niveau d’un grand