Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/413

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les choses du dehors ? sont-elles informes, confuses, ou bien, occupent-elles un même espace dans toutes leurs dimensions, ou bien, sont-elles aussi disposées symétriquement pour une certaine élégance ? tiennent-elles à ce monde, ou bien, en sont-elles séparées par un long intervalle, et roulent-elles dans le vide ? est-ce par le moyen de molécules indivisibles, que s’opère la structure de tout ce qui est né, de tout ce qui sera, ou bien, la matière des corps est-elle continue, et sujette à changer dans sa totalité ? les élémens sont-ils opposés entre eux, ou bien, sans se combattre, concourent-ils aux mêmes effets par des voies différentes ? L’homme étant né pour de telles recherches, jugez combien c’est peu de chose, que le temps qui lui est donné, lors même qu’il se le réserve tout entier. Admettons que la complaisance n’en laisse rien dérober, ni la négligence rien perdre, qu’il ménage les heures avec une extrême avarice, qu’il s’avance jusqu’aux dernières limites de la vie*humaine, que rien de ce que la nature lui a constitué ne soit bouleversé par la fortune ; malgré cela, homme qu’il est, pour la connaissance des choses immortelles il est trop mortel.

Ainsi donc, c’est selon la nature, que je vis, si je me suis donné à elle tout entier, si je suis son admirateur et son adorateur. Or, la nature a voulu que je remplisse les deux fonctions, celle d’agir, et celle de vaquer à la contemplation. Je remplis l’une et l’autre : car, la contemplation même n’existe pas sans l’action. Mais il faut savoir, dites-vous, si l’on s’est porté vers la première à cause du plaisir, pour ne chercher en elle, qu’une assidue contemplation, sans résultat ; celle-ci, en effet, est douce, elle a ses attraits. A cela, je vous répondrai : il faut éga-