Page:Sénèque - Œuvres complètes, trad. Baillard, tome II.djvu/612

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
602
QUESTIONS NATURELLES.

tenue par un corps qu’elle retient à son tour ; un globe de lumière qui n’adhérerait pas à un corps stable par lui-même serait certes bientôt dispersé par le rapide mouvement des cieux.

II. Pour faciliter nos recherches, il sera bon d’examiner si les comètes sont de même nature que les corps placés plus haut qu’elles. Elles ont avec eux des points de ressemblance, l’ascension, la déclinaison, et aussi la forme extérieure, sauf la diffusion et le prolongement lumineux ; du reste, même feu, même éclat. Si donc tous les astres sont des corps terreux, elles le seront pareillement. S’ils ne sont qu’une flamme pure, qui subsiste six mois durant et résiste à la révolution du monde si impétueuse, les comètes peuvent être aussi formées d’une substance déliée, que la rotation perpétuelle des cieux ne saurait dissoudre. Il ne sera pas hors de propos non plus de rechercher si le monde tourne autour de la terre immobile, ou si c’est le monde qui est fixe et la terre qui tourne. Des philosophes ont dit, en effet, que c’est nous que la nature emporte à notre insu ; que ce n’est pas le ciel, mais bien notre globe qui se lève et qui se couche. Question digne de toute notre attention, que celle de savoir quelle situation est la nôtre : si notre demeure est stationnaire ou douée du plus rapide mouvement ; si Dieu fait rouler l’univers autour de nous, ou nous autour de l’univers. Il faudrait aussi avoir le tableau de toutes les comètes qui apparurent avant nous : car leur rareté jusqu’ici empêche de saisir la loi de leur course et de s’assurer si leur marche est périodique, si un ordre constant les ramène au jour marqué. Or, l’observation de ces corps célestes est de date récente et ne s’est introduite que depuis peu dans la Grèce.

{{rom-maj|III}. Démocrite, le plus sagace des anciens observateurs, soupçonne qu'il y a plus d’étoiles errantes qu’on ne croit : mais il n’en fixe pas le nombre et ne les nomme point ; le cours des cinq planètes n’était pas même alors déterminé. Eudoxe, le premier, transporta d’Égypte dans la Grèce la connaissance de leurs mouvements. Toutefois il ne dit rien des comètes ; d’où il résulte que les Égyptiens même, le peuple le plus curieux d’astronomie, avaient peu approfondi cette partie de la science. Plus tard Conon, observateur aussi des plus exacts, dressa le catalogue des éclipses de soleil qu’avaient notées les Égyptiens, mais ne fit aucune mention des comètes, qu’il n’eût point omises s’il eût trouvé chez eux quelques faits constatés sur ce point. Seulement, deux savants qui disent avoir étudié chez les Chaldéens, Épigène et Apollonius de Myndes, ce dernier si ha-