I. Le premier livre, Novatus, m’offrait une matière facile, féconde. On est porté comme sur une pente facile en parlant du vice. Je passe maintenant à des questions plus délicates. La colère vient-elle d’un libre choix ou d’entraînement ? en d’autres termes, s’émeut-elle spontanément ? ou en est-il d’elle comme de tout transport qui s’élève en nous à notre insu ? Voilà où doit descendre la discussion, pour s’élever ensuite à de plus hauts développements. Dans la formation du corps humain, les os, les nerfs, les articulations, charpente de tout l’édifice, et les parties vitales, si peu agréables à voir, se coordonnent avant le reste ; vient ensuite ce qui fait les charmes de la figure et de l’extérieur ; et enfin, quand rien ne manque plus à l’ensemble, la nature y jette, comme dernier coup de pinceau, ce coloris qui plaît tant aux yeux. Que l’apparence seule d’une injure soulève la colère, nul doute ; mais suit-elle soudain cette apparence, s’élance-t-elle sans que l’âme y acquiesce, ou lui faut-il l’assentiment de l’âme pour se mettre en mouvement ? voilà ce que nous cherchons. Je tiens, moi, que la colère n’ose rien par elle-même et sans la permission de l’âme. Car entrevoir l’injure et en désirer la vengeance ; faire la double réflexion qu’on ne doit pas être offensé, et qu’on doit punir l’offenseur, cela ne tient pas au mouvement physique, qui devance en nous la