XVII. De tous les animaux, le moins traitable, celui qui a besoin d’être conduit avec le plus d’art, celui envers lequel l’indulgence est le plus nécessaire, c’est l’homme. Qu’y a-t-il de plus insensé que de rougir de se mettre en colère contre des bêtes de somme ou des chiens, tandis que l’homme, sous la domination de l’homme, serait réduit à la plus dure de toutes les conditions ? On traite les maladies, 011 ne s’irrite pas contre elles ; or, les vices sont les maladies.de l’âme ; ils exigent un traitement doux et un médecin sans emportement ; il n’y a que les mauvais médecins qui désespèrent de la guérison. Telle doit être envers les âmes malades la conduite de celui à quMe salut de tous est confié. Il ne se hâtera pas de repousser tout espoir et de déclarer que les symptômes sont mortels ; il luttera contre les vices, et leur résistera ; il adressera aux uns des reproches sur leur état ; et trompant eu quelque sorte les autres, il les soumettra à un régime adoucissant, et pour opérer une guérison plus prompte et plus sûre, il emploiera des remèdes déguisés. Que le prince mette ses soins non-seulement à sauver la vie, mais encore à ne pas laisser de cicatrices flétrissantes. Un roi ne retire aucune gloire d’un châtiment cruel : qui doute en effet de sa puissance ? Une gloire immense lui est réservée, au contraire, lorsqu’ÿ met un frein à sa violence, qu’il arrache de nombreuses victimes à la colère des autres, et qu’il n’en immole aucune à la sienne.
XVIII. La modération envers les esclaves est digne d’éloge ; il ne faut pas considérer quels traitements on pourrait leur infligerimpunément, mais ce qu’autorisent l’équité etl’humanité, qui ordonnent aussi d’épargner les prisonniers et les malheureux achetés à prix d’argent. Mais combien ne s’élèveront-elles pas plus justement encore en faveur d’hommes qui sont