Page:Sénèque - Oeuvres complètes, trad Charpentier, Tome III, 1860.djvu/61

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maintenant qu’elles réclament leur zélateur et leur pontife ; maintenant que vous ne devez plus quitter Homère et Virgile, qui ont bien mérité du genre humain, comme vous de toutes les nations et d’eux-mêmes, car vous les avez fait connaître à des peuples pour lesquels ils n’avaient point écrit. Ne redoutez rien pour tous les moments que vous mettrez sous leur sauvegarde. C’est maintenant que les faits de César réclament tous vos efforts ; il faut que tous les siècles en soient informés par un témoignage domestique : célébrez-les ; lui-même, pour la forme et le plan de ces annales, vous donnera et la matière et l’exemple.

XXVII. Je n’irai pas jusqu’à vous conseiller d’appliquer à la composition de fables, d’apologues dans le goût d’Esope, genre que n’ont pas essayé les Romains, cette grâce de style qui vous est propre. Il est difficile, sans doute, à une âme si rudement frappée, d’aborder tout à coup des exercices de pur agrément ; toutefois, tenez-vous sûr qu’elle est déjà raffermie et rendue à elle-même, si de compositions plus austères elle peut descendre à de moins graves sujets. Votre imagination, quoique malade encore et en lutte contre elle-même, se sentira distraite par le sérieux de ses travaux ; mais les choses qui veulent être traitées d’un esprit serein lui répugneront, tant qu’elle ne sera pas entièrement rentrée dans son assiette. Qu’elle commence donc par des sujets sévères, pour se détendre après sur de plus riantes productions.

Ce sera en outre un grand motif de soulagement de vous demander souvent à vous-même : Est-ce pour moi que je m’afflige, ou pour celui qui a cessé d’être ? Si c’est pour moi, auprès de qui est le mérite de la faiblesse dont je me pare ? Elle