Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/235

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LE MESSAGER.

Attendez que mon esprit se calme, et que mes membres glacés par la crainte retrouvent leurs mouvemens. L’image de ce crime épouvantable est encore là devant mes yeux. Tempêtes furieuses, emportez-moi loin de cet affreux spectacle, jusqu’aux lieux où le soleil a porté sa lumière en fuyant ces climats.

LE CHŒUR.

C’est nous tenir trop long-temps dans cette cruelle incertitude. Expliquez-nous enfin ce qui vous cause tant d’horreur ; dites-nous l’auteur du crime. Je ne demande pas qui, mais lequel des deux l’a commis. Parlez donc sans retard.

LE MESSAGER.

Dans la partie supérieure du palais de Pélops, est un édifice tourné au midi, dont l’extrémité, s’élevant comme une montagne, domine la ville, et tient comme sous le joug le peuple inquiet d’Argos. Là est une salle immense dont les combles dorés s’appuient sur de belles colonnes de marbre tacheté. Derrière cette salle, connue du vulgaire et dont l’entrée lui est permise, il est d’autres bâtimens plus mystérieux qui forment le centre de ce riche palais. Celui du prince est le plus intérieur de tous, et le plus caché : entre les murailles de ce sanctuaire de la royauté s’élève un bois antique dont les arbres ne sont point destinés à charmer la vue, et dont le fer n’a jamais émondé le feuillage. On n’y voit que l’if, le cyprès, et la sombre yeuse, dominés par un chêne orgueilleux qui s’élève de toute la tête au dessus de cette forêt. C’est là que les fils de Tantale vont prendre les auspices à leur