Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/249

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ne sont pas las encore, s’étonne de voir arriver si vite l’heure de son repas du soir.


Quelle puissance a fermé ta route dans le ciel ? quelle révolution soudaine a détourné tes coursiers de leur carrière accoutumée ? Est-ce que les Géans vaincus auraient brisé les portes de l’Enfer, et recommenceraient leur guerre contre les dieux ! Tityus a-t-il senti sa rage renaître dans son sein déchiré par le vautour ? Typhée a-t-il soulevé la montagne qui l’écrase et déployé ses vastes membres ? les vaincus de Phlégra tenteraient-ils contre le ciel une nouvelle attaque ? l’Ossa de Thrace va-t-il encore se dresser par leurs mains sur le Pélion de Thessalie ?

L’antique harmonie du monde est brisée ; plus de lever, plus de coucher du soleil. La fraîche déesse du matin qui amène les premiers feux du jour, et remet au dieu de la lumière les rènes de son char, voit avec étonnement ce trouble répandu dans son empire ; elle ne sait plus rafraîchir ses chevaux fatigués, ni plonger dans la mer son attelage inondé de sueur. Le Soleil, surpris de sa nouvelle demeure, trouve l’Aurore à son coucher, et appelle les ténèbres quand la nuit n’est pas prête encore. Les étoiles ne se montrent pas à sa place, aucun flambeau ne s’allume dans le ciel, et la lune ne vient point diminuer l’horreur de cette obscurité profonde.


Et plût au ciel que ce fût là seulement la nuit ! Une