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de Thessalie ; ainsi marchait la mère de l’insensible Hippolyte. Je parcourrai les bois dans le même appareil où l’on vit cette reine du Tanaïs ou des Palus-Méotides fouler le sol de l’Attique, à la tête de ses bataillons d’Amazones qu’elle avait amenés des rivages glacés de l’Euxin. Un simple nœud rassemblait ses cheveux et les laissait tomber sur ses épaules ; un bouclier en forme de croissant couvrait son sein. Je serai comme elle.

LA NOURRICE.

Laissez là ces tristes plaintes ; la douleur ne soulage point les malheureux. Ne songeons qu’à fléchir le courroux de la chaste déesse des bois. Reine des forêts, la seule des immortelles qui vous plaisiez à habiter les montagnes, la seule aussi qu’on y adore, écartez de nous les malheurs que nous annoncent de sinistres présages. Grande déesse des forêts et des bois sacrés, ornement du ciel, et flambeau des nuits, vous qui partagez avec le dieu du jour le soin d’éclairer le monde, Hécate aux trois visages, rendez-vous favorable à nos vœux. Domptez le cœur de l’insensible Hippolyte ; qu’il apprenne à aimer, qu’il ressente les feux d’une ardeur partagée ; qu’il écoute la voix d’une amante. À vous de vaincre son cœur farouche et de le faire tomber dans les filets de l’amour ; à vous de ramener sous les lois de Vénus cet homme si fier, si dur et si sauvage ; consacrez toute votre puissance à ce grand changement ; et puisse votre visage briller toujours d’un vif éclat, votre disque n’être jamais offusqué de nuages ; que jamais, quand vous tiendrez les rênes de votre char nocturne, les chants des magiciennes de Thessalie ne vous forcent à descendre sur