Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/389

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sanglans exercices de Mars ? Le souverain maître du monde, voyant les mains de la mort si actives à détruire, a pris soin de réparer les pertes du genre humain par des naissances toujours nouvelles. Otez de l’univers l’amour qui en répare les désastres , et comble le vide des géné- rations éteintes, le globe ne sera plus qu’une solitude effrayante el confuse ; la mer sera vide et sans flottes qui la sillonnent ; plus d’oiseaux dans les plaines du ciel, plus d’animaux dans les bois ; l’air ne sera plus traversé que par les vents. Voyez que de fléaux divers détruisent et moissonnent la race humaine ; la mer, l’épée et le crime ! mais , en écartant même cette destruction nécessaire’ et fatale, n’allons-nous pas nous-mêmes au devant de la mort ? Que la jeunesse garde un célibat stérile, tout ce que vous voyez autour de vous ne vivra qu’une vie d’homme, et s’éteindra pour jamais. Prenez donc la nature pour guide, fréquentez la ville, et re— cherchez la compagnie de vos concitoyens.

HIPPOLYTE.

Il n’est pas de vie plus libre , plus exempte de vices, ni qui rappelle mieux les mœurs innocentes des premiers hommes, que celle qui se passe loin des villes , dans la solitude des bois. Les aiguillons brûlans de l’avarice n’entrent point dans le cœur de l’homme qui se garde pur au sommet des montagnes ; il ne rencontre là ni la faveur du peuple, ni les caprices de la multitude toujours injuste envers les hommes de bien, ni les poisons de l’envie, ni les mécomptes .de l’ambition ; il n’est point l’esclave de la royauté, ne la désirant pas pour lui— mëme ; il ne se consume point dans la poursuite des