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Scène III.

THÉSÉE.

O saintes lois de la naturel ô maître de l’Olympe, ô Neptune, roi des mers, où un pareil monstre a-t-i’l pris naissance ? Est-ce la Grèce qui l’a porté, ou le Taurus inhospitalier, ou le Phase de Colchide ? Le naturel des aïeux se retrouve dans leurs enfans, et rien de pur ne peut sortir d’une source corrompue. C’est bien là le sens dépravé de ces guerrières Amazones ; mépriser les noeuds de l’hymen, et se garder chaste long-temps pour ensuite se prostituer à tous. O sang infâme, que l’influence d’un climat plus doux ne saurait purifier ! Les bêtes elles- mêmes ne connaissent point ces criminelles amours, et une pudeur instinctive leur fait respecter les saintes lois de la nature. Fiez-vous donc à ce visage sévère, à cette gravité fausse et menteuse, à ce maintien négligé qui rappelait la vie austère de nos aïeux, à cette rigidité de moeurs digne d’un vieillard, à ce langage froid et sérieux ! O hypocrisie du visage de l’homme ! La pensée demeure invisible au fond du coeur ; les vices de l’âme se cachent sous la beauté du corps ; l’impudique se revêt de pudeur, l’audacieux prend. un extérieur tranquille, la vertu devient le masque du crime, la vérité celui du mensonge, et la débauche affecte les dehors d’une vie sombre et austère. O loi, farouche habitant des forêts, toi si pur, si plein d’innocence ct dc pudeur naïve, c’est