Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/443

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sommet de la montagne humide, l’écume sort de cette tête. effrayante qui absorbe et renvoie les vagues. On croirait voir le terrible souffleur bondir au milieu des flots, et lancer avec force l’eau qu’il a reçue dans ses vastes flancs. — Enfin cette masse énorme s’ébranle, et, se brisant à nos yeux, jette sur le rivage un monstre plus effroyable que tout ce que nous pouvions craindre : la mer se précipite en même temps sur la terre à la suite du monstre qu’elle avomi. — La terreur nous glace jusqu’aux os.

THÉSÉE.

Quelle forme avait cette masse effrayante ?

LE MESSAGER.

C’était un taureau furieux à la tête azurée ; une crête superbe domine son front verdâtre : ses oreilles sont droites et hérissées ; ses cornes sont de deux couleurs : l’une conviendrait aux taureaux superbes qui marchent à la tête des troupeaux, l’autre est celle des taureaux marins. Ses yeux lancent des flammes et des étincelles - bleuâtres. Son cou monstrueux est sillonné de muscles énormes, et ses larges naseaux se gonflent avec un bruit terrible. L’algue verte des mers s’attache à sa poitrine et à son fanon ; ses flancs sont parsemés de taches d’un jaune ardent. L’extrémité de son corps se termine en une bête monstrueuse ; c’est un immense dragon hérissé d’écailles, qui se traîne en replis tortueux, et sem- blable à ce géant des mers qui engloutit et rejette des vaisseaux tout entiers. — La terre a tremblé : les trou- peaux éperdus fuient en désordre à travers les campagnes, et le pasteur oublie de suivre ses bœufs dis