Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/445

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perses. Tous les animaux des bois prennent la fuite, le chasseur glace d’effroi demeure immobile et prive de sentiment. Hippolyte seul ne tremble pas ; il serre for- tement les rênes, arrête ses coursiers et calme leur frayeur en les encourageant de sa voix qui leur est connue. w Sur le chemin d’Argos est un sentier taillé dans le roc, et côtoyant la mer qu’il domine. C’est là que le monstre se place et prépare sa fureur. Après s’être assuré de lui-même, et avoir éprouvé sa colèrè, il s’é- lance d’un bond rapide, et, touchant à peine la terre dans la vivacité de sa course, vient s’abattre furieux sous les pieds des chevaux épouvantés. Votre fils alors lève un front menaçant, et, sans changer de visage, crie d’une voix terrible : a Ce vain épouvantail ne saurait ébranler mon courage ; vaincre des taureaux, c’est pour moi une tâche et une gloire héréditaires.» Mais, au même instant, les chevaux, rebelles au frein, entraînent le char : ils s’écartent de la route ; et, dans l’emportement de leur frayeur, ils courent au hasard devant eux, et se préci- pitent à travers des rochers. Hippolyte fait comme un pilote qui cherche à retenir son vaisseau battu par une mer orageuse, et emploie toutes les ressources de son art pour empêcher qu’il ne se brise contre les écueils : tantôt il tire fortement les rênes, tantôt il déchire leurs flancs à coups de fouet. —-— Le monstre s’attache à ses pas ; tantôt il marche à côté du char, tantôt il se pré— sente à la tête des chevaux et les effraie de toutes les ma« nières. Impossible de fuir plus long-temps, le taureau marin dresse devant eux ses cornes menaçantes. Alors les coursiers éperdus ne savent plus obe’ir à la voix qui