Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/79

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siez le genou devant moi pour adorer ma puissance. Au contraire, j’aime en vous ce fier courage que vous montrez dans vos malheurs. Vous méritez d’avoir un roi pour époux, unissons nos destinées.

MÉGARE.

Une sueur glacée découle de tous mes membres dont le sang se retire. Quelle affreuse parole a frappé mes oreilles ! Je n’ai point éprouvé cette horreur quand le cri de la guerre et le fracas des armes ébranlaient nos murailles. J’ai supporté sans pâlir tous ces malheurs. Mais l’idée de ce mariage m’épouvante, et me fait sentir enfin mon esclavage. Qu’on m’accable de chaînes, que le long supplice de la faim me conduise lentement à la mort, nulle puissance ne vaincra ma fidélité. Je mourrai ton épouse, ô Hercule !

LYCUS.

Est-ce donc cet époux descendu aux enfers qui vous inspire cet orgueil ?

MÉGARE.

Il n’est descendu aux enfers que pour conquérir le ciel.

LYCUS.

Mais la terre immense pèse sur lui de tout son poids.

MÉGARE.

Il a porté le ciel, nul fardeau ne saurait l’accabler.

LYCUS.

Je saurai bien vous contraindre.

MÉGARE.

Pour se laisser contraindre, il faut ne savoir pas mourir.