Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 2.pdf/73

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ŒDIPE.

La fidélité n’est pour les perfides qu’un instrument de leurs mauvais desseins.

CRÉON.

Sans porter le poids de la royauté, ma position me fait jouir de tous les avantages de cc rang suprême ; mes concitoyens s’empressent dans mon palais ; proche pa- rent de ceux qui gouvernent, il ne se lève pas un seul jour sans que leurs dons enrichissent ma demeure. Meu- bles somptueux, table opulente, grâces obtenues par mon crédit, que puis-je désirer encore après tant de biens, et que manque-t-il à mon bonheur ?

ŒDIPE.

Ce que vous n’avez pas. L’homme ne peut se borner tant qu’il n’est qu’au second rang.

CRÉON.

Ainsi, vous me condamne : comme coupable, sans’avoir examiné ma cause.

ŒDIPE.

Et moi-même , vous ai—je rendu, compte de ma vie ? Tiresias a-t—il examiné ma cause ? et pourtant il me dé- clare coupable. C’est un exemple que vous me donnez ; je veux le suivre ?

CRÉON.

Et si je suis innocent ?

ŒDIPE.

Pour les rois , un soupçon vaut une certitude.

CRÉON.

S’effrayer ainsi sans sujet, c’est mériter de courir un danger réel.