Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 2.pdf/77

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Scène II.

LE CHŒUR.

Non, Œdipe, vous n’êtes point l’auteur de nos maux ; ce n’est point la destinée des Labdacides qui s’appesantit sur nous, mais l’éternelle vengeance des dieux irrités : depuis le jour où la forêt de Castalie a prêté son ombre hospitalière à l’étranger de Sidon , et que Dircé a baigné de son onde les pieds des navigateurs tyriens ; dépuis que le fils du grand Agénor, las de chercher à travers le monde l’amoureux larcin de Jupiter, s’est reposé sous nos arbres pour rendre hommage au dieu qui avait ravi sa sœur, et que, par le conseil d’Apollon , qui lui or— donnait de suivre une vache errante, dont la lourde charrue ou le poids du chariot n’eût jamais courbé la tête, il arrêta sa course vagabonde, et appela notre contrée Béotie, du nom de cette vache fatale ; depuis ce temps, hélas ! cette malheureuse terre ne cesse de pro- duire, chaque jour , des monstres nouveaux. Tantôt c’est un serpent énorme qui, nourri dans le creux de nos val- lées, fait entendre, au niveau des plus hauts chênes, ses affreux sifflemens , et dresse au dessus des pins ct des arbres de Chaonie sa tête bleuâtre, tandis que la plus grande partie de son corps se replie sur le sol ; tantôt c’est une armée de soldats furieux que la terre enfante. La trompette sonne, l’airain des ’combats fait entendre son cri terrible. Avant d’avoir appris à fermer des pa- roles ; avant de connaître l’usage de la voix , ils s’attaquent. avec des cris de guerre ; ces frères sauvages se