Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/141

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mains à ton gré : que tardes-tu, ô déesse ! à mettre à profit ma fureur ? Quel crime veux-tu que je commette ? j’en ai trouvé un : tu hésites ? je n’ai plus besoin de toi, ma colère me suffit.

La Nourrice

Étouffez, ma fille, ces plaintes insensées, et calmez cette fureur qui vous brûle. Montrez-vous l’épouse d’Hercule en triomphant de votre jalousie.

Déjanire

Iole, cette captive, donnerait des frères à mes enfants ! une servante deviendrait l’épouse du fils de Jupiter ! l’eau et le feu se mêleront donc ensemble, et l’Ourse du pôle se plongera dans les eaux bleues de l’Océan ? Je ne resterai pas sans vengeance : tu as porté le ciel sur tes épaules, tu as donné la paix à l’univers, mais qu’importe ? il est quelque chose encore de plus redoutable que ton hydre, le ressentiment d’une femme outragée : les flammes que l’Etna vomit contre le ciel sont moins terribles ; ma fureur sera plus puissante que tous les monstres que tu as vaincus. Une captive me ravir le lit de mon époux ! Jusqu’ici j’ai craint les monstres, maintenant il n’y en a plus pour moi ; une rivale odieuse les a tous remplacés. Puissant maître des dieux, et toi père de la lumière, je n’ai donc été la femme d’Hercule que pour le temps où il était entouré de dangers ? tous mes vœux pour son bonheur ont tourné au profit d’une captive ; c’est pour ma rivale que j’ai été heureuse ; c’est pour elle, ô dieux ! que vous avez exaucé mes prières ! c’est pour elle que mon époux revient triomphant ! O douleur qu’aucune vengeance ne pourra satisfaire ! in-