Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/145

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les pierres et les feux tomberont sur vous, toute la terre s’armera pour la cause de son vengeur : seule contre tous, combien serez-vous punie ? En supposant que vous échappiez à la vengeance de la terre et du genre humain, le père d’Hercule ne porte-t-il pas la foudre ? Voyez déjà ses feux menaçants traverser le ciel, et le tonnerre ébranler le monde avec un bruit épouvantable. Craignez jusqu’à la mort même dans laquelle vous vous flattez peut-être de trouver un asile : l’oncle d’Hercule la tient sous son empire ; où que vous alliez, malheureuse, vous rencontrerez partout les dieux ses parents.

Déjanire

Je conviens que ce que je médite est le plus grand des crimes ; mais la colère m’y pousse.

La Nourrice

Vous mourrez.

Déjanire

Oui, mais je mourrai l’épouse du grand Hercule ; mais le jour, à mon l’éveil, ne me verra point dans le veuvage ; mais une captive ne montera point sur ma couche. Le soleil se lèvera du côté du couchant, les Indiens seront glacés par les frimas du pôle septentrional, et le soleil noircira de ses rayons les Scythes nomades, avant que les femmes de la Thessalie me voient solitaire et délaissée. J’éteindrai dans mon sang les flambeaux de mon hymen. Que le traître périsse ou qu’il me tue : qu’il ajoute son épouse aux monstres qu’il a détruits : je consens à ce qu’il me mette au nombre de ses travaux ; mais je veux de mes mains mourantes m’attacher à son lit nuptial. Oui, oui, c’est avec le titre de son épouse