Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/211

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de ses chants, et il vit sans danger le fleuve qui garantit les serments des dieux. Sa voix arrêta la roue d’Ixion, et enchaîna son branle rapide. Le foie de Tityus eut le temps de croître, pendant que les vautours écoutaient ; Caron se repose pour entendre, et la barque du fleuve infernal marche sans le secours des rames. Pour la première fois, le vieux Tantale ne songe plus à saisir l’onde immobile ; il oublie sa soif furieuse, et n’avance point ses mains sur les fruits.

Mais comme il quittait les enfers, en touchant les cordes de sa lyre, les pierres elles-mêmes étaient attendries, et suivaient les pas du chantre divin. Les Parques renouent le fil des jours d’Eurydice ; mais son amant oublie la condition qui lui a été faite ; il doute que son Eurydice lui ait été rendue, et, se retournant pour voir si elle le suit, il perd le fruit de son chant. Revenue à la vie, elle meurt ainsi une seconde fois.

Alors cherchant des consolations sur sa lyre, il fait entendre aux Gètes ces lamentables paroles : « Les dieux mêmes sont soumis à la loi du trépas, sans en excepter celui qui règle le cours de l’année et la partage en quatre