Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/281

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Femmes de la Thrace, meurtrissez votre sein, faites retentir de vos cris plaintifs les rives glacées de l’Hèbre : pleurez Alcide, car c’est par lui que vos enfants ne sont plus tramés aux écuries de Diomède, et ne servent plus de pâture à ses cruels chevaux.

Terre de Libye, qui respires maintenant par la mort d’Antée, plaines de l’Hespérie, que mon fils a délivrées du barbare Géryon, pleurez. Unissez-vous à ma douleur, malheureuses nations, et que les deux mers entendent vos gémissements.

Et vous aussi, habitants du ciel, dieux, donnez des larmes au trépas d’Hercule ; il a prêté ses fortes épaules à votre demeure chancelante ; il a soutenu le poids du ciel, lorsque Atlas, qui porte sur sa tête l’Olympe étoile, demanda un moment pour respirer.

Tu devais l’admettre dans ta haute demeure, tu devais lui ouvrir le ciel, ô Jupiter ! où est l’effet de ta promesse ? Hercule est mort comme un homme vulgaire, il est enseveli. Combien de fois pourtant il a ménagé ta foudre, et laissé reposer tes flammes vengeresses, au lieu de tant de carreaux qu’il t’eût fallu lancer sans lui ! frappe-moi du moins, et prends-moi pour Sémélé.

Es-tu descendu déjà dans l’Élysée, ô mon fils ! as-tu vu le rivage où la nature assemble tous les humains, ou si, pour avoir enlevé le chien des morts, on t’a fermé les portes du Styx, et forcé ton ombre de s’arrêter sur le seuil des demeures infernales ? quel tumulte, quel trouble s’est élevé parmi les Mânes à ton arrivée ? Sans doute le vieux nocher s’est enfui à ta vue, en t’aban-