Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/345

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NÉRON.

Les débauches de la mère me donnent peu de confiance dans sa fille, et jamais Octavie ne m’aima sincèrement.

SÉNÈQUE.

Dans une si grande jeunesse la tendresse ne peut guère se montrer ; la pudeur timide couvre le feu de l’amour.

NÉRON.

C’est ce que j’ai cru moi-même long-temps, abusé que j’étais, malgré les marques d’antipathie qu’elle me donnait, et la haine qui se témoignait sur son visage. Enfin j’ai résolu de me venger de ses dédains ; j’ai trouvé une femme digne par sa naissance et par sa beauté de ma couche impériale ; Vénus, Junon et la fière Pallas ont moins d’attraits.

SÉNÈQUE.

Ce qu’un époux doit aimer dans une femme, c’est la vertu, la fidélité conjugale, la pudeur et la chasteté : il n’y a que les qualités de l’âme qui demeurent toujours et que rien ne peut corrompre ; la beauté passe comme une fleur dont chaque jour flétrit l’éclat.

NÉRON.

Celle que j’aime réunit tous les dons les plus rares ; les dieux semblent l’avoir formée telle pour mon bonheur.

SÉNÈQUE.

Ne vous livrez point en aveugle à la puissance de l’Amour.

NÉRON.

L’Amour règne au ciel, et le dieu de la foudre lui--