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Page:Sénac de Meilhan - L'Émigré, Tome 2.djvu/130

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rendre auprès de madame la Comtesse, votre nièce, qu’on dit bien aimable. Je me trouve trop heureuse, monseigneur, mais cependant j’ai sur le cœur un chagrin dont je vais prendre la liberté de vous parler. Mon papa avait un nègre qui l’a défendu tant qu’il a pu ; il nous a arrachés aux flammes que j’ai vu brûler tout notre château, et aux brigands qui ont massacré mon père, et je n’oserais vous dire ce que les barbares ont encore fait ; car je frémis d’horreur en y songeant, et je vous ferais trop de peine. Le brave Almanzor nous a conduites, ma mère et moi, dans une cave où il nous a gardées deux jours au risque de se faire massacrer, et il nous a accompagnées à Francfort. Il me portait, monseigneur, quand j’étais trop lasse ; car nous avons fait plus de soixante-dix lieues à pied, mais ce