aux germanismes (il y en a cependant), qu’à un certain manque d’aisance et de souplesse dans l’allure. En outre, la trame ordinaire de son style est pauvre et commune, et ses meilleures pages sont gâtées par une phraséologie vieillotte qui sent à la fois la province et le collège. Elle dépare notamment le Remorqueur et le Haut-Fourneau, où elle jure avec la modernité du sujet. De plus, Weustenraad déclame souvent, surtout dans ses premières œuvres, dont la lecture est pénible. Il y confond la langue de la poésie avec une rhétorique un peu vulgaire, que revendique un certain journalisme, et il abuse de mots abstraits tels que Liberté, Progrès, Fraternité, qui, depuis 1848, ont beaucoup perdu de leur puissance évocatrice et que les poètes d’aujourd’hui abandonnent volontiers aux orateurs de meetings.
Ces réserves n’empêchent pas Weustenraad d’être, par moments, un poète très estimable. C’est souvent le cas dans les poésies écrites à partir de 1840, qui témoignent d’une relative maturité : « La diction y est plus pure, la pensée plus complète, la période plus pleine et plus harmonieuse, » dit le savant Quetelet, décidément bon juge en matière littéraire. Le poète atteint souvent, dans ses dernières œuvres, à la justesse simple et forte de l’expression, fruit d’un travail patient et d’une conscience sévère[1]. On trouve
- ↑ Certaines strophes du Haut-Fourneau et de l’Avenir, les brouillons du poète l’attestent, ont été recommencées dix ou quinze fois.