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NOTICE BIOGRAPHIQUE


pauvreté se cachait mal sous le luxe ; et s’il y avait chez les Adhémar plus d’honneur que d’honneurs, il y avait surtout plus d’honneurs que d’argent.

Il fallut prendre un grand parti pour étayer cette fortune délabrée. Avant même que madame de Sévigné partît pour la Provence, il était déjà question d’un mariage pour le jeune marquis de Grignan, ou, pour mieux dire, de plusieurs mariages ; mais il y en avait un qui semblait à madame de Sévigné plus souhaitable et plus sage que les autres. Dans une lettre écrite à sa fille pendant ce temps très-court où elle resta sans elle à Paris en 1694, elle l’avertissait de ne songer ni à mademoiselle d’Ormesson, pour qui l’on avait un autre parti en vue, ni à mademoiselle de Lavardin, dont le père ne voulait écouter aucun de ceux qui avaient quelque embarras dans leur maison. Mais il paraît qu’il restait deux choix entre lesquels flottait l’esprit de madame de Grignan, deux choix que madame de Sévigné appelait deux extrémités. Elle désignait l’un par l’or, l’autre par les pierres[1]. Il faut peut-être entendre par ces pierres quelque très-noble et magnifique château, comme celui de Grignan, avec plus d’écussons au-dessus des portes que d’argent dans les coffres-forts. L’or était une alliance avec la fille d’un fermier général. L’orgueil et le dur sentiment de la nécessité étaient aux prises ; et l’orgueil commençait à s’avouer qu’il n’était pas le plus fort. Ne semble-t-il pas que

  1. Lettres du 19 et 21 avril 1694.