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Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 1.djvu/455

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1658

Mme la marquise de Lavardin[1] me confia une belle lettre de la reine Christine, où Sa Majesté témoignoit qu’elle étoit éblouie comme les autres des lumières de votre esprit, et enchantée des charmes secrets qui sont en votre aimable personne. Je fus tellement touché de voir la princesse du monde la plus éclairée rendre de si glorieux témoignages de votre rare mérite, que, ne pouvant retenir ma joie au fond de mon cœur, j’en fis part à une de mes amies qui vous adore, Madame, mais qui est aussi foible que je le suis, et qui ne put s’empêcher de succomber à la même tentation que je n’avois pas eu le courage de repousser. Ainsi, Madame, la gloire de votre nom a volé plus loin que vous ne vouliez, et fait à cette heure dans l’Anjou, et peut-être même dans la Bretagne, un bruit qui vous importune[2]. En ce cas-là, cette humilité dont vous êtes si jalouse, et que vous voulez conserver au milieu d’une infinitè de qualités éclatantes qui ont bien de la peine à compatir avec elle, aura sans doute beaucoup à souffrir. Je suis cause de tout ce désordre par l’indiscrétion de mon zèle ; et ce qui m’afflige davantage en cela, c’est que le repentir de ma faute ne m’aidera pas à la réparer. Il m’est venu en pensée de

    conde partie de ses Lettres, publiée en 1659. — Costar, archidiacre de l’évêché du Mans, qui dirigeait l’éducation du fils unique de la marquise de Lavardin, belle-sœur de son évêque, avait eu occasion de recevoir au Mans, en 1652, Mme de Sévigné, comme nous l’apprenons par une lettre de l’abbé Foucquet à Conrart (Manuscrits de Conrart, Biblioth. de l’Arsenal, tome IX, p. 877).

  1. Voyez la Notice, p. 158, et la note 5 de la lettre 132.
  2. « La reine Christine avait fait un grand éloge de Mme de Sévigné dans une lettre écrite à Mme de Lavardin, que celle-ci avait communiquée à Costar. Mme de Sévigné écrivit à ce dernier, pour se plaindre de la publicité qu’il avait donnée à cette lettre. C’est à cette lettre de Mme de Sévigné que répond la première des deux lettres de Costar. » (Walckenaer, tome II, p. 168.)