Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 1.djvu/489

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 459 —

1664

probation et de négative, qui scandalisoient les gens de bien.

Quand M. Foucquet a eu cessé de parler, Pussort s’est levé impétueusement, et a dit : « Dieu merci, on ne se plaindra pas qu’on ne l’ait laissé parler tout son soûl. » Que dites-vous de ces belles paroles ? Ne sont-elles pas d’un fort bon juge ? On dit que le chancelier est fort effrayé de l’érésipèle de M. de Nesmond, qui l’a fait mourir ; il craint que ce ne soit une répétition pour lui. Si cela pouvoit lui donner les sentiments d’un homme qui va paroître devant Dieu, encore seroit-ce quelque chose ; mais il faut craindre qu’on ne dise de lui comme d’Argant : E mori come visse[1].


60. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ
À M. DE POMPONE.

Jeudi 4e décembre.

Enfin les interrogations sont finies. Ce matin M. Foucquet est entré dans la chambre ; M. le chancelier a fait lire le projet[2] tout du long. M. Foucquet a repris la parole le premier, et a dit : « Monsieur, je crois que vous ne

  1. « Et il est mort comme il a vécu. »

    Moriva Argante, e tal moría qual visse.

    (Tasso, Gerus. lib., c. XIX, st. 26.)
  2. Lettre 60. — i. C’était un projet vague de résistance et de fuite en pays étranger, que Foucquet avait écrit quinze ans auparavant, quand la France était en proie aux factions, et dans un moment où il croyait avoir à se plaindre du cardinal Mazarin. Cet écrit fut trouvé dans sa maison de Saint-Mandé, derrière un grand miroir, où il avait été abandonné et oublié. On en fit la base principale de l’accusation. Voyez les Mémoires de Mme de Motteville, tome IV, p. 292 et suivantes.