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1670

102. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE
DE BUSSY RABUTIN.

À Paris, ce 16e avril 1670.

Je reçois votre lettre : vous êtes toujours honnête et très-aimable ; je ne vais guère loin chercher dans mon cœur pour y trouver de la douceur pour vous :

Enfin n’abusez pas, Bussy, de mon secret,
Au milieu de Paris il m’échappe à regret ;
Mais enfin il m’échappe, et cette retenue
Ne peut plus contenir la lettre que j’ai lue.

Je vous remercie donc de m’avoir rouvert la porte de notre commerce qui étoit tout démanché. Il nous arrive toujours des incidents, mais le fond est bon ; nous en rirons peut-être quelque jour. Revenons à M. Frémyot. N’est-il pas trop bon ce président, d’avoir pensé à moi lorsque j’y pensois le moins[1] ? Je l’aimois fort, et j’y joins présentement une grande reconnoissance ; de sorte que ma douleur a été véritable. Cela est honteux, comme vous dites, que Mme la présidente survive à un si admirable mari. C’est tout ce que je puis faire, moi qui vous parle. Adieu, je vous souhaite une patience qui triomphe de vos malheurs.

Vous ne voulez pas que je vous parle de Mme de Grignan, et moi je vous en veux parler. Elle est grosse, et demeure ici pour y faire ses couches. Son mari est en Provence, c’est-à-dire, il s’y en va dans trois jours.


  1. Lettre 102. — i. Mme de Sévigné, dans la lettre du 10 juin 1671, évalue sa part dans la succession du président Frémyot à cent mille francs. Bussy, dans sa lettre du 15 septembre 1677, dit qu’elle traita de cette part avec le président de Berbisy, moyennant dix mille écus. Voyez aussi la lettre du 13 octobre 1677, et celles du 23 juin et du 9 août 1678.