pas, et il eut l’impudence d’écrire à madame de Sévigné : « Je
n’avais pas tort hier, madame, de me défier de votre imprudence ; vous avez dit à votre mari ce que je vous dis... J’ai
pourtant été assez heureux pour le désabuser » (pour l’abuser
eût été plus vrai). « ... Vous savez que la jalousie a quelquefois
plus de vertu pour retenir un cœur que les charmes et que
le mérite ; je vous conseille d’en donner à votre mari, ma
belle cousine, et pour cela je m’offre à vous, si vous le faites
revenir par là... S’il faut qu’il vous échappe, aimez-moi, ma
cousine, et je vous aiderai à vous venger de lui en vous aimant
toute ma vie[1]. » Un page, chargé de porter cette lettre de bon
matin, ne trouva pas madame de Sévigné encore éveillée, et ne
vit point d’inconvénient à se défaire de son message entre les
mains du mari. Sévigné, furieux contre l’ami qui le trahissait,
défendit à sa femme de le plus recevoir. « Elle me le manda, dit
Bussy, et qu’avec un peu de patience, cela s’accommoderait un
jour[2]. » Le coupable ne pouvait se plaindre d’un excès de rigueur ; mais c’était assez faire pour un indigne mari que de
ne pas écouter sérieusement ceux qui s’offraient comme consolateurs. Les maltraiter n’était pas un devoir rigoureux ; et
madame de Sévigné n’aimait pas plus que Célimène à prendre
un bâton pour mettre dehors les galants. On pourrait croire
aussi que, par malice à la fois et par vanité, Bussy a été fort
capable de faire madame de Sévigné un peu plus indulgente
alors pour lui qu’elle ne le fut en effet. Il ne doit pas cependant s’être éloigné beaucoup de la vérité ; car ce fut bien peu
de temps après cette aventure qu’il lui écrivit, le 2 juillet 1650,
une lettre où il put lui parler comme si rien ne fût arrivé, et
dont le style galant n’était pas moins leste ni moins libre que
par le passé.
Il était alors à Montrond, où la princesse de Condé lui avait envoyé, le 15 juin, l’ordre de se rendre. Qu’il combattît pour ou contre Mazarin, la fatalité le jetait toujours dans le camp opposé à celui des Sévigné. L’arrestation des princes, en donnant naissance à la nouvelle Fronde, avait rapproché de la cour l’ancienne Fronde, celle de Gondi et de ses adhérents. Bussy continuait d’être engagé, quoique avec beaucoup