Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 11.djvu/111

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

20


tagnes les plus élevées[1], il y a encore loin de chez moi au Parnasse, et je n’y puis atteindre. Je ne vois rien de plus joli ni de plus gracieux que vos lettres, Madame, et celles de M. d’Ardène ; elles ont été ma consolation dans ma solitude, qui est devenue toute des plus grandes depuis le départ de M. de Simiane : je ne saurois assez vous remercier l’un et l’autre de vos aimables attentions. Cette réponse vous sera, s’il vous plaît, commune. C’est demain le grand jour de l’arrivée de mon père; je vais au-devant de lui à Boulène[2]. Toutes ces contrées vous sont inconnues, Madame ; mais si M. d’Ardène avoit eu la bonté de ne vous communiquer que le talent de la versification, j’aurois employé et le vert et le sec pour vous attirer dans nos retraites. Tâchez d’être libre l’année prochaine, afin que nous puissions jouir de vous à notre tour : ce seroit pour moi un plaisir infini. Oh! les belles parties de piquet et de reversis que nous ferions! l’eau m’en vient à la bouche. Est-il possible que pas un de ces galériens[3] n’ait été tenté de venir avec mon père ? Cela est effroyable : ne diroit-on pas qu’ils ont toutes les affaires du monde ? Je ne le leur pardonne pas. Adieu, Madame, adieu, Monsieur, adieu aimable couple que j’estime et que j’honore de tout mon cœur : ne m’oubliez point, et croyez-moi bien sincèrement votre, etc.

  1. 2. Le château de la Garde était bâti sur une montagne : voyez tome IV, p. 191, note 3, et ci-dessus, p. 19, note 2.
  2. 3. Boulène ou Bollène, petite ville située à peu de distance du Rhône, à deux lieues au nord d’Avignon. C’était le chemin de Grignan.
  3. 4. Officiers de galère.