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enfant, il n’y a guère d’apparence que je vous y voie jamais.

Di memoria nudrirsi, piii che di speme[1].

C’est bien ma vraie devise. Nos sentences ont été trouvées jolies. Ne comprenez-vous point bien qu’il n’y a jour, ni heure, ni moment, que je ne pense à vous, que je n’en parle quand je puis, et qu’il n’y a rien qui ne m’en fasse souvenir ? Nous sommes sur la fin du Tasse, et Goffredo a spiegato il gran vessillo della croce sopra’l muro[2]. Nous avons lu ce poëme avec plaisir. La Mousse est bien content de moi et de vous encore plus, quand il songe à l’honneur que vous faites à la philosophie[3]. Je crois que vous n’auriez pas eu moins d’esprit quand vous auriez eu la plus sotte mère du monde ; mais enfin tout ensemble fait un assez bon effet. Nous avons envie de lire Guichardin, car nous ne voulons point quitter l’italien. La Murinette le parle comme du françoist[4]. J’ai reçu une lettre de notre Cardinal[5], qui me dit encore pis que pendre du gros abbé[6] qui est avec lui. Adieu, ma

  1. 7. Se nourrir de souvenir plus que d’espérance. C’est la pensée contenue dans ces deux vers de la Jérusalem délivrée (chant VI, stance LX) :

              …Nudrisce nel sen l’occulto foco
              Di memoria via più che di speranza.

  2. 8. Godefroi a déployé le grand étendard de la croix sur la muraille. Voyez les stances xcix et c du XVIIIe chant de la Jérusalem délivrée

    Al Capitano
    Che……………………… della santa
    Croce il vessillo in su le mura pianta.

  3. 9. Voyez la Notice, p. 311 et suivante.
  4. 10. Elle avait en 1667 accompagné dans leur voyage de Rome le duc et la duchesse de Chaulnes. Voyez les Mémoires de Coulanges, p. 95, et la lettre du 23 octobre 1689.
  5. 11. Le cardinal de Retz.
  6. 12. L’abbé de Pontcarré. Voyez la note 11 de la lettre 164.