Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 2.djvu/322

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 316 —

M. d’Andilly m’a envoyé le recueil qu’il a fait des lettres de M. de Saint-Cyran[1]. C’est une des plus belles choses du monde : ce sont proprement des maximes et des sentences chrétiennes, mais si bien tournées qu’on les retient par cœur, comme celles de M. de la Rochefoucauld. Quand il se débitera[2], priez Mme de la Fayette ou M. d’Hacqueville d’en demander un pour vous à M. d’Andilly : il vous sera très-obligé de cette confiance. Quand vous songerez qu’il n’a jamais eu un sou d’aucun de ses livres, et qu’il les donne tous, vous verrez bien que c’est l’obliger que d’en vouloir un de sa main. Je défie M. Nicole de mieux dire que ce que vous avez écrit sur le changement de nos passions ; il n’y a pas un mot de plus ou de moins que ce qu’il faut.


1671

193. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Vitré, mercredi 12e août.

Enfin, ma bonne, me voilà en pleins états ; sans cela les états seroient en pleins Rochers. Dimanche dernier, aussitôt que j’eus cacheté mes lettres, je vis entrer quatre carrosses à six chevaux dans ma cour, avec cinquante gardes à cheval, plusieurs chevaux de main et plusieurs pages à cheval. C’étoient M. de Chaulnes, M. de Rohan,

  1. 11. Jean du Verger ou du Vergier de Haurane, né à Bayonne en 1581, abbé de Saint-Cyran en 1620, mort en 1643. Compagnon d’études et ami de Jansénius (évéque d’Ypres), il fut le fondateur du jansénisme en France.
  2. 12. Les Instructions chrétiennes tirées par M. Arnauld d’Andilly des deux volumes de lettres de messire Jean du Verger de Haurane, abbé de Saint-Cyran, parurent chez P. le Petit, en 1671. L’achevé d’imprimer est du 5 décembre.