Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 2.djvu/338

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 332 —

1671

gnet. Les cris qu’elle fait sont épouvantables, c’est comme si une Furie s’étoit rompu le bras en enfer. On envoie querir cet homme qui vint pour Saint-Aubin[1]. J’admire comme les accidents viennent, et vous ne voulez pas qui j’aie peur de verser ? c’est cela que je crains ; et si quelqu’un m’assuroit que je ne me ferois point de mal, je ne haïrois pas à rouler quelquefois cinq ou six tours dans un carrosse ; cette nouveauté me divertiroit : mais un bras rompu me fera toujours peur après ce que je viens de voir. Adieu, ma très-chère et très-aimable bonne ; vous savez bien comme je suis à vous, et que l’amour maternelle y a moins de part que l’inclination.


196. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, dimanche 23e août.

Vous étiez donc avec votre présidente de Charmes[2] quand vous m’avez écrit ! Son mari étoit intime ami de M. Foucquet, dis-je bien ? Enfin, ma fille, vous n’êtes point seule, et M. de Grignan avoit raison de vous faire quitter votre cabinet, pour entretenir votre compagnie : ce qu’il auroit pu retrancher, c’est sa barbe de capucin ; il est vrai qu’elle ne lui fait point de tort, puisqu’à Livry, avec sa touffe ébouriffée[3], vous ne pensiez pas qu’Adonis fût plus beau : je redis quelquefois ces quatre vers avec

  1. 16. Charles de Coulanges, seigneur de Saint-Aubin, oncle de Mme de Sévigné, frère de l’abbé de Livry et de Chésières. Voyez la Notice, p. 145.
  2. Lettre 196. — 1. Femme d’un président du parlement d’Aix.
  3. 2. Hémistiche d’un bout-rimé rempli par Mme de Grignan. (Note de Perrin.)