Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 2.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 393 —

1671


intérêt que je prends à votre santé me feroit devenir habile, si j’étois auprès de vous. Je donne des avis à la petite Deville qui feroient croire à Mme Moreau[1] que j’ai eu des enfants. En vérité, j’en ai beaucoup appris depuis trois ans. Mais j’avoue qu’auparavant cela l’honnêteté et la préciosité d’un long veuvage m’avoient laissée dans une profonde ignorance ; je deviens matrone à vue d’œil.

Vous avez M. de Coulanges présentement, qui vous aura bien réjoui le cœur ; mais vous ne l’aurez plus quand vous recevrez cette lettre. Je l’aimerai toute ma vie du courage qu’il a eu de vous aller trouver jusqu’à Lambesc. J’ai fort envie de savoir des nouvelles de ce pays-là ; je suis accablée de celles de Paris ; surtout la répétition du mariage de Monsieur me fait sécher sur le pied. Je suis en butte à tout le monde, et tel qui ne m’a jamais écrit, s’en avise pour mon malheur afin de me l’apprendre. Je viens d’écrire à l’abbé de Pontcarré que je le conjure de ne m’en plus rompre la tête, et de la Palatine[2] qui va querir la princesse[3], et du maréchal du

  1. 2. Cette dame Moreau avait gardé Mme de Grignan pendant sa première couche. Voyez la lettre du 11 novembre suivant, p. 410.
  2. 3. Anne de Gonzague, née en 1616, morte en 1684 ; seconde fille de Charles de Gonzague, duc de Nevers et de Réthel, puis de Mantoue et de Montferrat, et de Catherine de Lorraine ; veuve depuis 1663 du prince Édouard, palatin, l’un des fils de Frédéric V (duc de Bavière, élu roi de Bohême) et d’Élisabeth, sœur de Charles Ier d’Angleterre. Elle était mère de la princesse de Salm, de Madame la Duchesse, et de la duchesse de Hanovre.
  3. 4. Élisabeth-Charlotte de Bavière, née en 1662, morte en 1722 ; fille de Charles-Louis Ier, duc de Bavière, palatin du Rhin, huitième électeur en 1648, mort en 1680, et de Charlotte de Hesse-Cassel, morte en 1686. Son père était frère aîné du mari de la Palatine, et sa mère sœur de la princesse de Tarente. Sur cette bonne princesse, d’un esprit si original, et que Mme de Sévigné trouvait « d’une sincérité charmante, » voyez les lettres du 2 décembre 1671, du 6 janvier